farioli
21 oct

cochonnailles


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Le paradoxe du cochon de Soutine, ou le beau exsangue :
Une collectionneuse américaine achète un tableau de Soutine « le cochon qu’on égorge », elle fait appel au restaurateur Anglais et lui dit :
– Oh you know, I love this marvellous pig but I can’t stand blood !
Le sang a donc été éliminé par le restaurateur consciencieux. Qui est le cochon dans cette affaire ?
Voici un article parut dans les Echos :

Frank Cohen, soixante-deux ans, est un des collectionneurs en vue de Grande-Bretagne dans le domaine de l’art contemporain. Il a fait partie du jury du Turner Prize, prix très médiatique consacré aux nouveaux talents anglais, et le magazine américain ” Forbes ” le cite dans sa liste des ” top collectors ” du monde. Ce n’est pas une raison pour se prendre au sérieux. Ce rouquin à l’allure informelle dont l’attitude évoque un enfant hyperactif ne tient pas en place, toujours à l’affût de nouveautés. D’une nature joviale, il parle avec l’accent typique de Manchester, sa ville natale où il réside toujours. Un vrai self-made-man qui a quitté l’école à quinze ans pour vendre du papier peint sur les marchés avant, quelques années plus tard, d’ouvrir des magasins de bricolage Glyn Webb, dans le nord de l’Angleterre. Il les a revendus en 1997 et se consacre aujourd’hui à la collection d’art contemporain.

Il pense avoir toujours eu une âme de collectionneur. A vingt ans, il se passionnait pour les monnaies anglaises mais son premier achat en matière d’art a été une toile de Lawrence S. Lowry (1887-1976), un peintre natif de Manchester qui continue, d’ailleurs, à l’intéresser. Il est connu pour ses représentations de la vie quotidienne du début du XXe siècle, dans un cadre urbain industriel. ” Tous les gens du nord de l’Angleterre comprennent Lowry. Et ceux qui n’ont jamais acheté d’art achètent tout de même Lowry. ” Les horizons de Frank Cohen sont cependant plus vastes. ” Pour moi, l’art est un hobby. N’étant jamais allé à l’université, c’est un domaine qui permet d’exercer ma curiosité. Je suis un acheteur compulsif. ”

Cependant, il se rappelle précisément des détails qui jalonnent l’évolution de sa collection. ” Un jour de 1978 dans la vitrine de Waddington [un des grands galeristes anglais], je vois une gouache représentant un coeur de couleurs vives par l’Américain Jim Dine. 2.600 dollars ! C’était l’artiste américain du moment. Je procède à un échange et j’échelonne le paiement. Mon entrée dans l’art contemporain était justifiée par le fait que je voulais sortir de l’aspect misérable et sombre de l’art moderne anglais. Je voulais des couleurs, de la gaieté. ” Aussitôt, l’homme au tempérament de feu cherche de nouveaux buts d’acquisition.

Il est ambitieux (” Je voulais le meilleur “) et découvre Dubuffet, ” un gros calibre de l’art du XXe siècle. J’ai acheté une de ses toiles, “La Vie en rose” pour 20.000 livres. C’était beaucoup d’argent. Mais je savais qu’il s’agissait d’un grand artiste. L’oeuvre est dans ma salle à manger. ”

En 1992, Frank Cohen attrape le virus de l’art très contemporain : images puissantes, grands formats. Il achète beaucoup d’oeuvres d’Américains - Rauschenberg, David Salle, Duane Hanson. ” Pour moi, ces artistes étaient théâtraux. J’adorais ça. ” Dans le nord de l’Angleterre, il est alors le seul à manifester une telle passion : ” Il n’y avait pas de galerie, pas de collectionneur, aucune référence. J’ai constitué pour mon usage personnel une bibliothèque de 35.000 volumes. Je ne les lis pas, je regarde les images “, remarque-t-il en souriant.

Mais, 1992, c’est presque déjà trop tard pour acquérir à bon compte le leader du mouvement des Young British Artists, le fameux Damien Hirst. Frank Cohen avoue : ” J’avais quatre ans de retard. J’ai tenté de les rattraper en achetant comme un fou d’autres artistes dans les galeries de Londres. C’était fun, hype, un nouveau domaine à découvrir… ” L’euphorie l’entraîne dans le cyclone de la superconsommation d’art mais il n’oublie pas ses erreurs passées. Il se met en quête de nouveaux mouvements, en précurseur. Ainsi, au milieu des années 1990, il fréquente l’Allemagne pour découvrir des peintres comme Daniel Richter ou Michel Majerus, aujourd’hui des noms recherchés du marché. ” C’est à cette période-là que je suis devenu adulte dans la collection. ”

Aujourd’hui, ses achats sont plus articulés. Parmi ses favoris, l’Américain Richard Prince : ” J’ai acheté plusieurs oeuvres de lui dans les cinq dernières années, des ” Joke Paintings ” et la série des ” Nurses ” [les " Joke Paintings " reprennent en grand format sur des toiles le principe des " blagues " publiées dans les journaux américains tandis que la série des " Nurses " reprend des archétypes de l'infirmière au style pin-up des publications des années 1950 et 1960]. C’est un excellent peintre, la succession de Lichtenstein d’une certaine manière. ” Il évoque aussi Cindy Sherman. Mais à côté de ces valeurs sûres, il continue à chasser les jeunes talents. Comme son ami le célèbre collectionneur Charles Saatchi - qui expose en ce moment ses dernières acquisitions à la Royal Academy de Londres - il s’intéresse à de jeunes artistes vivant aux Etats-Unis.

Sa lecture de la scène artistique internationale est cependant acide : ” Aujourd’hui, 90 % de l’art c’est de la cochonnerie, et les prix sont ridiculement élevés mais, désormais, je suis prudent. J’achète un tableau à la fois. ” Comment assume-t-il les erreurs du passé ? ” Tout le monde en commet. Cela m’a permis d’apprendre. Et puis sans être marchand, quelquefois je revends. ” Ce fils de Manchester montre désormais une sélection des 1.500 oeuvres de sa collection dans deux bâtiments industriels à la périphérie de sa ville natale. Une façon de faire partager son enthousiasme.
Artistes ! Nous sommes tous des cochons. !, cet animal impur qui ne regarde jamais le ciel.